Le dessin aux confins de l'abstraction

Découvrez l'approche singulière du dessin de Léa Belooussovitch à travers une quarantaine d'œuvres réalisées à main levée et au crayon de couleur sur du feutre textile blanc. L'artiste réinterprète selon un long processus, des photographies de nature violente issues des médias. Cette démarche confère un nouveau souffle à ces photographies, en faisant ressortir la part d’humanité qu’il y reste.

 

Les dessins de Léa Belooussovitch répondent à un même protocole. Elle commence par sélectionner dans la presse ou sur Internet des images qui nous assaillent quotidiennement, liées à des faits d’actualités dramatiques : attentats au Pakistan, scènes de guerre en Syrie... L'artiste se concentre sur la représentation de victimes anonymes blessées ou vulnérables. Léa Belooussovitch soumet ces images-sources à diverses manipulations (recadrage, agrandissement) avant d’entamer leur transfert sur le support du feutre. Ce travail lent et répétitif d’accumulation des traits du crayon de couleur altère l’aspect lisse de la matière et lui confère un volume duveteux.

Les formes qui émergent sont des halos colorés brouillant la reconnaissance de la scène. Dans ce passage du pixel au pigment, la netteté de l’image initiale se mue ainsi en un dessin flou qui semble contenir et atténuer sous sa surface la douleur de la représentation. Le titre de chaque œuvre ancre néanmoins le dessin dans le réel en situant la ville, le pays et la date de l’événement tragique. La bande blanche de feutre laissée vierge en haut du dessin suggère, quant à elle, le recadrage effectué à partir de la photographie d’origine.

Par ce brouillage des repères et cette mise à distance de la violence, Léa Belooussovitch nous interpelle autant sur notre rapport à l’information que sur le voyeurisme, tout en activant notre imaginaire. Le caractère esthétique et sensible, voire sensuel, de ses dessins dissimule sous un voile pudique de douceur la présence/absence de l’humain confronté aux atrocités et aux soubresauts du monde contemporain. Cette démarche vise à démontrer combien, selon les mots de l’artiste, "la violence de l’information a pris le dessus sur l’humanité que l’événement contient".

Léa Belooussovitch est invitée dans le cadre de la 10e édition du Prix des Partenaires. Le Musée décerne ce Prix chaque année à un artiste émergent, grâce au soutien de ses mécènes.


Prolongez votre visite de l'exposition à la bibliothèque Jean Laude du Musée. Découvrez une sélection de livres d’artistes sur les thématiques des violences, des conflits, des guerres, dans le cadre des expositions de Léa Belooussovitch, Feelings on felt et d'Éric Manigaud, La mélancolie des vaincus. Que ce soit au travers de reproductions de photographies ou encore de coupures presse, appréhendez des épisodes marquants de l'histoire ayant inspiré ces deux artistes dans leurs œuvres.

La bibliothèque, située au premier étage du musée, vous accueille de 14 h à 18 h le lundi, mercredi, jeudi et vendredi et sur rendez-vous en juillet et août.

L'artiste

Léa Belooussovitch est née en 1989 à Paris, elle vit et travaille à Bruxelles. Elle est diplômée en dessin de l'ENSAV La Cambre, Bruxelles en 2014. Son travail est présent dans des collections privées et publiques. Elle est représentée par la galerie Paris-Beijing à Paris.

En savoir plus : http://www.leabelooussovitch.com/

COMMISSARIAT

Alexandre Quoi
Responsable du département scientifique du MAMC+

Livre d'artiste

Léa Belooussovitch. Feelings on felt
Livre d'artiste. Entretien de Léa Belooussovitch avec Alexandre Quoi. Édition bilingue français – anglais. Coédition avec The Drawer. 100 pages. Prix : 23 euros.ISBN 9782955992784

ENV. 40 DESSINS

Un processus lent et répétitif

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